essai créatif d'écriture avec visuel inventé
inspiration de la forêt
La veille
La veille
Ma tasse métallique rafraîchie par la nuit est à court de vin. Je la pose et me hisse hors de mon socle. Au clair de lune qui effleure mon chemin, je fend l’obscurité.
Les taches bleutés me guident, gouttes sélènes révélant ça et là les roches moussues que je contourne en titubant, encore grisé par la chaleur bipolaire du brasier, qui assommait mon front tout en esquivant ma face cachée. Les ouaouarons ne se donnent plus la réplique. La complainte du huard n’est qu’un souvenir. La nuit s’est avancée sans m’avertir et passera le flambeau à l’aube si je ne sors pas de ma torpeur.
Les rebonds sourd de mes pas patauds s’éclaircissent lorsque j’émerge des bosquets denses sur ce quai de bois gris, cuit de soleils plombants. Si clair de jour, opaque de nuit mais rassurant. Comme une parcelle de civilisation. J’y avance avec la confiance du terrain connu, jusqu’à l’arête surplombant l’onde fraîche. Le lac est un miroir d’huile qui n’attend plus rien. L’odeur du feu est en filature, imprégné dans mon col. Un ballet de volutes dansantes au gré des courants tempérés du lac s’étirent et sont aspirés de la forêt vers les confins de la lueur que ma lampe peine à cracher. M’offrant un spectacle silencieux, mais à la fois envoûtant, je suis pétrifié.
Après ces minutes de contemplations hors du temps, je lève le nez.
À la cîme acérée des conifères muets, les étoiles dansent paisiblement tombant dans l’inlassable course vers le matin. Milles points s’étirent dans les reflets. Comme une berceuse, ce tableau m’invite à rebrousser chemin, et retrouver mon poêle au refuge, que j’allumerai tel mon soleil de fonte, mon ange gardien. Je m’assoupis dans un étui de duvet étroit, dans le crépitement caverneux de l’antre de fer. Étrangement, un petit orifice derrière l’appareil projette sur la céramique l’image inversée du feu qui s’anime en son ventre. Les principes de physique optique sont eux, sans répit. Moi, j’ai lâché prise.